« Les armes de la liberté ne doivent être touchées que par des mains pures » disait Louis-Antoine de Saint-Just, le législateur. Incorruptible Saint-Just : avec six planètes en Vierge, il fut l’homme d’ordre par excellence, à la fois moraliste et fanatique de la discipline, bien après le cardinal de Richelieu et Jean-Baptiste Colbert, bien avant Alain Peyrefitte et Régis Debray.
L’ordre, c’est un hobbit pour les Vierge, une nécessité publique et une hygiène personnelle. C’est une méthode scientifique : Antoine-Laurent Lavoisier établit les bases de la chimie moderne, Georges Cuvier celles de la paléontologie.
C’est un art moral : Jean-Baptiste Greuze fut un peintre de mœurs, Jean-Dominique Ingres un perfectionniste de la forme, Jean-François Millet un intimiste du quotidien. L’ordre de la Vierge envahit également la poésie et le roman : Pierre de Ronsard s’indignant de la misère, Nicolas Boileau qui veut « réduire la Muse aux règles du devoir », Johann-Wolfgang Goethe qui avouait : « Je suis l’esprit qui toujours nie ». Léon Tolstoï qui recopia sept fois les septs volumes de « Guerre et Paix » avant de se faire apôtre de la vérité, et plus proches de nous Alain Jouffroy, Félicien Marceau, inquiets, minutieux du texte, sceptiques.
Des Saint Thomas, les Vierge, elles ne croient que ce qu’elles touchent. Et quel toucher si l’on pense à des musiciens tels que Jean-Philippe Rameau ou Léonard Bernstein, ou des chanteurs toujours à la limite de l’écorché vif comme Léo Ferré ou Léonard Cohen.
Les grandes dames de la Vierge sont plus rares, mais encore plus inaccessibles : divine Greta Garbo, fascinante Agatha Christie, mystérieuse Ingrid Bergman, énigmatique Léonor Fini, étonnante Françoise Giroud, indéfinissable Sabine Azéma. Mais toutes dans un style très pur comme au masculin le sobre Jean-Louis Barrault ou Elia Kazan.
Mais la Vierge, c’est aussi la logique poussée dans ses extrêmes ou ses fanatismes : en témoignent aussi bien le philosophe Hegel que le politique César Borgia, Charles de Foucauld, ascète sur le tard après avoir mené une vie dissolue, Hans Arp, peintre dadaïste et surréaliste, Claude Nougaro, qui jongle avec la logique des mots.
Mais les Vierge les plus folles furent sans aucun doute Alfred Jarry et sa machine à décerveler, Jarry qui réclama un cure-dent le jour de sa mort, et Antonin Artaud qui alla aux extrêmes de l’écriture et de la folie, Artaud qui prétendait n’avoir ni père ni mère et ne voulait être que le fils de lui-même.