La pollinisation est le processus par lequel le pollen des plantes est transféré des organes reproducteurs mâles aux organes reproducteurs femelles pour former des graines. Pendant la floraison, le pollen est transféré de l’anthère au stigmate, le plus souvent par le vent ou par les insectes.
La soudaine et mystérieuse disparition des abeilles à travers les États-Unis et partout dans le monde met en lumière le rôle essentiel que tiennent les abeilles dans l’alimentation des hommes et dans la production agricole. Ce phénomène est appelé le syndrome d’effondrement des colonies d’abeilles ou CCD en anglais (Colony Collapse Disorder) et les cultivateurs sont de plus en plus inquiets concernant la capacité de l’industrie apicole à satisfaire la demande de pollinisation des cultures (d’autant que les populations d’abeilles sauvages sont aussi en diminution). De chaque bouchée de nourriture que nous consommons, un tiers dépendrait d’une abeille.
Il est clair qu’il ne s’agit nullement d’incidents isolés. Les pertes d’abeilles sur la Côte Ouest des États-Unis ont atteint 30 à 60%. Les apiculteurs de la Côte Est et du Texas font état, quant à eux, de plus de 70% de pertes. Au Royaume-Uni, 3 espèces d’abeilles sauvages sur 25 sont éteintes et nombre d’apiculteurs européens ont observé des phénomènes similaires en Belgique, en France, aux Pays-Bas, en Pologne, en Grèce, en Italie, au Portugal et en Espagne, avec les rapports initiaux provenant de la Suisse et de l’Allemagne à un degré moindre. De possibles cas du syndrome d’effondrement des colonies d’abeilles ont également été signalés à Taïwan depuis avril 2007.
Les causes de ce syndrome ne sont pas encore bien compris. De nombreuses théories sont avancées : les changements environnementaux, la malnutrition, la maladie, les acariens, les pesticides et les cultures génétiquement modifiées avec leurs propres caractéristiques de désinsectisation, comme, par exemple, le maïs transgénique. Certaines personnes prétendent que les disparitions d’abeilles n’ont pas été signalées par les apiculteurs professionnels, suggérant par là que la pratique même de l’apiculture pourrait être à l’origine de ces disparitions !
Les abeilles auraient-elles le bourdon ?
Lors d’un cas d’effondrement d’une colonie d’abeilles signalé par l’université de Penn State en Pennsylvanie, une enquête préliminaire menée par plusieurs cultivateurs faisait état d’une période de stress exceptionnel affectant les abeilles en question juste avant qu’elles ne meurent, le plus souvent à cause d’une malnutrition et/ou d’une trop grande sécheresse. Ce stress représente le seul facteur commun existant entre tous les cas de déclins d’abeilles signalés à ce jour. Par conséquent, il y a au moins une éventualité considérable que ce phénomène soit lié à un stress nutritionnel, et qu’il ne soit pas manifeste sur les colonies en bonne santé.
Il se pourrait aussi, tout simplement, que les abeilles soient stressées. Lors de la saison froide, les activités de la colonie sont réduites, les abeilles se nourrissent des provisions qu’elles sont censées avoir accumulées. Cette immobilité pourrait réduire leur immunité aux virus, pour peu que leurs provisions soient insuffisantes.
Les acariens ont également endommagé des colonies d’abeilles, et les insecticides utilisés pour tenter de tuer ces acariens ont freiné l’aptitude des reines à engendrer de nouveaux essaims d’abeilles ouvrières. En outre, les reines vivent moins longtemps qu’il y a quelques années. Par ailleurs, l’empressement des apiculteurs à transporter leurs colonies d’un littoral à l’autre pourrait amplifier le stress des abeilles et contribuer à répandre les virus et les acariens.
Poison fatal ?
Il n’est pas exclu que les OGM y soient pour quelque chose. 40% de la production de maïs aux Etats Unis sont génétiquement modifiés. Durant 3 ans, de 2001 à 2004, une équipe de chercheurs a examiné les effets du pollen d’une variété de maïs génétiquement modifié appelée « maïs Bt » sur les abeilles. Un gène d’une bactérie du sol a été inséré dans le maïs permettant à la plante de produire un agent toxique pour les insectes ravageurs. L’étude a conclu qu’il n’y avait aucune preuve de toxicité du maïs Bt sur la santé des abeilles. Toutefois, lorsque les abeilles utilisées dans ces expériences furent infestées par un parasite, il se produit de manière significative une baisse plus forte du nombre d’abeilles parmi les insectes qui avaient ingéré une forte concentration du poison Bt.
Le climat incriminé ?
Certains apiculteurs pensent que le coupable pourrait être le changement climatique, dans lequel la Terre, dans son ensemble, se réchauffe, mais avec des températures régionales et locales beaucoup plus faibles ou plus élevées que la normale. Les conditions météorologiques irrégulières causées par le réchauffement de la planète mettent à mal les cycles sensibles des abeilles. Par exemple, un hiver exceptionnellement chaud et sec peut modifier le cycle de floraison de nombreuses plantes, et une montée soudaine des températures, alors que les bourgeons et les gamétophytes sont en train de se former, peut donner du pollen stérile. Les fleurs également éclosent plus tôt que par le passé, et des plantes telles que l’érable rouge et le saule blanc – généralement premières sources de pollen pour les abeilles – s’épanouissent en quelques semaines avant que les abeilles ne soient prêtes à voler, au printemps.
Abeilles mutantes
Censée être meilleure butineuse, donc plus productive, l’abeille hybride, croisement malheureux entre l’abeille africaine (introduite par l’homme au Brésil en 1956) et l’abeille locale, est devenue une tueuse, plus résistante certes, mais également très agressive envers ses congénères mais aussi envers l’homme. Actuellement, elle est en train de coloniser tout le continent américain.
Renaissance
Mais la nature a plus d’une corde à son arc et n’a pas encore rendu les armes. Certes, l’abeille tient le sommet de la chaîne alimentaire, sans elle, plus de production de fruits, de légumes… plus de biodiversité. Les raisons de sa disparition semblent être causées par les manipulations génétiques et/ou les changements climatiques.
Mais les abeilles sont sur Terre depuis 50 millions d’années et ont certainement traversé de nombreux bouleversements liés à l’activité de la planète – elles se sont adaptées, ont migré et survécu. Et si l’homme arrête de se mêler de tout et de jouer à l’apprenti-sorcier, chaque espèce pourra décider de son sort, et s’accoupler comme bon lui semble… Et si les abeilles ressentent le besoin de se métisser pour renforcer leur race, ce sera pour le bien de tous.
En attendant, il existe d’autres espèces de butineurs : le bourdon, le papillon, le moro sphinx. Et si les butineurs venaient à manquer, la nature nous ferait-elle un petit tour de passe-passe, comme par exemple, inciter les fleurs à l’autopollinisation ?